Des petits jardins ruraux, on parle peu. Ils imprègnent le paysage à tel point que nous les regardons sans les voir. Et pourtant, le jardinier compose un microcosme où l'utile se mêle à l'esthétique, le rêve au nécessaire. Il trace des allées, joue avec l'ombre et la lumière, bêche, sème, sarcle et se souvient des savoirs transmis dans le cercle familial. La jardinière décide, cueille, transforme. Il lui faut « 200 poireaux pour l'hiver, trois planches de haricots pour les conserves, des carottes pour le début juin... ». Le jardin envahit alors la cuisine et le voilà transformé en soupe, potage, confiture et autres recettes. Les légumes prennent aussi des allures de médicaments : les pissenlits en salade chassent les miasmes de l'hiver, le vin de citronnelle ouvre l'appétit, l'infusion de bourrache soigne la toux et l'ail tue les vers.
Mais le jardin n'est pas seulement utilitaire : la jardinière cultive aussi des fleurs. Combinaison de variétés anciennes et d'espèces nouvelles, de savoirs et de recettes, de légumes et de fleurs, le modeste jardin rural devient alors le reflet du temps qui passe... et une source essentielle d'informations pour la connaissance de la vie rurale bas-normande.