Les mots

Denise Duong, dans sa préface, me fait l’honneur de souligner mon “amour inconditionnel des mots”. Elle me fait là un bien précieux cadeau. Le petit Marcel Pagnol avait cette “passion des mots” et s’amusait à les “collectionner”. Par ailleurs, le pouvoir des mots est immense, car lourd de conséquences : George Sand écrit dans “Leone Léoni” : « Un mot suffit pour faire tressaillir une âme ». Et ce choix des mots est particulièrement important quand il s’agit de poésie. Valère Novarina écrit : « Pour moi, les mots sont des animaux sauvages, avec leur histoire, et on a à faire à une onde… le langage est incarné dans un corps, dans une pièce, dans un volume, dans le volume du livre. C’est très beau que le livre en français soit un volume parce que je combats toute vision plate du langage… »
Oui, les mots sont la nourriture de l’écrivain, et chacun réagit différemment face à eux : Novarina les voit “en volume”, moi, je les vois en puzzle. Devant ma feuille de papier, je peux les choisir, les assembler, les dompter, faire en sorte qu’ils s’acceptent, ou se rejettent suivant l’effet recherché ; je peux les unir, les opposer, les faire chanter, claquer, se répondre les uns aux autres, faire un contraste ou une harmonie. Il n’y a pas de limite… Aucune autre activité ne me donne cette impression de puissance.
Écrire de la poésie, c’est faire de la dentelle, ou de la musique, ou un tableau. Ce n’est en aucun cas un travail ; c’est un jeu, un plaisir. Peu de plaisirs sont aussi jouissifs que celui-là. Essayez ; vous verrez…

Thérèse Ruffault-Jombart