La réflexion de Jacques Maritain sur l'art est un des aspects les plus intéressant et les plus originaux de son oeuvre. Mais la plausibilité d'une esthétique dépend grandement du fait que les praticiens puissent y reconnaître la sorte d'activité à laquelle ils se livrent en fait. Or un des traits les plus frappants de la réception des idées de Maritain est l'enthousiasme manifesté à leur égard par des artistes réels. Ses livres ont été reçus comme une libération par ceux qui devaient lutter contre une conception de l'art religieux contraire à l'idée même d'art, au sens d'une épiphanie de l'invisible dans une forme visible. Ce fut le cas en particulier de David Jones et Flannery O'Connor - un poète et un dessinateur d'un côté, et une romancière de l'autre. Aujourd'hui plus encore qu'hier, cette idée de la nature de l'art a une dimension théologique. Car si les choses « donnent plus que ce qu'elles ont » dans l'univers esthétique comment peut-on éviter de rapprocher tôt ou tard l'excès et la profusion de ce don d'une image de la poésie divine ? Autrement dit de l'Amour ?