Pendant neuf mois de séjour au Cameroun, Louis Destouches, âgé de 22 ans, découvrit l’exercice de la médecine et exprima, à travers une importante correspondance, les prémisses d’une vocation littéraire. L’œuvre de Céline témoignera avec force des impressions de ce vécu africain, qui succéda immédiatement à celui de la Grande Guerre. Ce fut sa seconde guerre, comme il le note : « l’angoissante nature des blancs, provoquée, libérée, bien débraillée enfin, leur vraie nature, tout comme à la guerre ». Médecin sans diplôme, Louis Destouches se pencha instinctivement sur la grande misère de son prochain, misère physique et morale des blancs de la colonie, misère physiologique et sociale des populations Fang de la forêt.
Pierre Giresse, professeur émérite de géologie, a fait une partie de sa carrière à Brazzaville et il a longtemps vécu dans les territoires du Cameroun, du Gabon et du Congo dont il a étudié les environnements sédimentaires de la forêt. Le hasard de ses recherches l’a conduit jusque dans l’extrême sud camerounais, notamment à proximité des lieux du séjour africain (Bikobimbo, Dipikar) du tout jeune Louis Destouches. Au cours d’un « pélerinage moderne » l’auteur nous invite à revisiter la nature tropicale et ses habitants, familiers aux lecteurs de Voyage au bout de la nuit. Pour approcher et comprendre ce Céline africain, peut-être est-il préférable d’avoir soi-même un peu vécu en Afrique.