Ce document est exceptionnel : aucun futur pape de l'Église catholique n'avait en effet tenu depuis le début de son ministère un journal quasi quotidien de ses activités, aucun futur pape avant Angelo Giuseppe Roncalli, plus connu sous le nom de bienheureux Jean XXIII. Sur de grands agendas du commerce, celui-ci notait jour après jour les événements, grands et petits, qui marquaient son activité au service du Saint-Siège. Son arrivée à la nonciature de France, en décembre 1944, ne devait pas mettre un terme à cette habitude : il y sera fidèle tout au long de cette mission, qu'il remplira jusqu'en février 1953. Le présent ouvrage consiste en une édition critique des agendas des premières années parisiennes (1945-1948). Ceux-ci fourmillent de notations inédites sur la situation politico-religieuse de la France au lendemain de la Libération : on y découvre le point de vue du nonce et de ses principaux interlocuteurs (Charles de Gaulle, Georges Bidault, Robert Schuman) sur des questions aussi brûlantes alors que l'éventualité d'une épuration épiscopale, le renouvellement des cadres du catholicisme français ou le devenir de son rayonnement intellectuel et apostolique. Mais leur intérêt n'est pas seulement historique : il tient aussi à la personnalité même de Mgr Roncalli. Peut-on déjà déceler en lui quelque chose du futur Jean XXIII, le successeur inattendu de Pie XII ? La réponse n'est ni simple ni univoque, mais elle passe par la découverte de l'autoportrait involontaire qui se dégage de ces agendas : prêtre tridentin de modèle classique, mais diplomate peu conformiste, Mgr Roncalli semble être plus intéressé par la découverte de la France que par certaines réceptions parisiennes ou par le travail de bureau inhérent à sa charge. Plus et mieux que bien des témoignages contradictoires, ces agendas fournissent du prélat une image tout en nuances et non dépourvue de surprises.