Ce livre se veut une explication et une exposition de ce qu'est le «fait juif». On considère en effet que la dénomination classique de «question juive» dénature déjà ce dont il s'agit en laissant entendre que c’est quelque chose qui dérange.

Comprendre le «fait juif», c’est comprendre cette étrange persistance, dont on ne sait pas trop si c’est celle d’une école, d’un peuple, d’une religion ou encore d’autre chose. Selon l’auteur, pour entendre le «fait juif», la bonne méthode consiste à se rendre attentif à ses trois modes de manifestation, aux trois manières dont il se rend sensible aujourd’hui:

-l’extermination voulue il y a soixante ans par les nazis

-la loi que les Juifs gardent et s’efforcent minoritairement d’appliquer et de comprendre depuis si longtemps

-L’Etat que les Juifs ont acquis depuis peu, mais qui est déjà l’objet d’une infinie controverse.

Le sens du «fait juif» ne peut être saisi que si l’on aperçoit comment ces trois modes se raccordent. C’est dans l’étude–observance, c’est à dire ce qu’on appelle ordinairement l’orthodoxie religieuse, que résident les clés du «fait juif». Encore faut-il adopter le bon regard sur celle-ci: ce livre prétend que c’est le regard épistémologique, que la tradition de la loi juive est avant tout une variante singulière de la rationalité, demandant à être comparée avec les sciences humaines, la mathématique, la physique, la philosophie, la théorie analytique du langage.

Mais le livre ne s’éloigne pas de tout ce que nous savons par ailleurs du pathétique et du «hors de prix» de l’expérience juive. Il puise à l’enseignement de Levinas pour tenter, en conclusion, de dire ce qu’est l’unité et surtout la finalité de l’expérience juive, à quoi tend l’obstination dans l’étude et l’observance de cette étrange lignée que toute son histoire semble détacher de l’être.